FDA : une victoire pour l’industrie, un risque pour les amateurs européens
Après la victoire de l’industrie du cigare sur la FDA, le fossé se creuse entre un marché américain toujours aussi peu régulé et des marchés européens qui s’enfoncent dans la répression. Analyse.
La décision rendue le 9 août par un juge fédéral de Washington DC est une victoire nette et pleinement méritée pour l’industrie du cigare aux Etats-Unis.
Une victoire nette car le juge a entièrement écarté le projet de régulation du secteur avancé par la FDA. Si l’Agence fédérale des aliments et des médicaments veut à nouveau tenter de réguler le marché du cigare fait main – ce qui ne manquera pas d’arriver -, elle devra reprendre toute la procédure depuis le début – ce qui veut dire jouer cartes sur table : publier un projet détaillé, consulter les professionnels sur celui-ci, puis éventuellement amender son texte et en publier la version définitive.
C’est aussi une victoire légitime dans la mesure où le juge a pleinement reconnu la spécificité du cigare premium par rapport aux autres produits du tabac. La volonté de la FDA était de rassembler dans un grand tout les produits du tabac hors cigarettes : vapoteuses, sachets de nicotine, cigares faits machine et cigares faits main. Les professionnels ont produit huit critères pour définir ce qu’est un cigare fait main et sont parvenu à convaincre le juge – une définition qui englobe la quasi-totalité des cigares roulés à la main et non aromatisés. On se prend à rêver que les régulateurs européens en viennent un jour à des conclusions semblables, car même si la matière première est identique, le cigare fait main, dégusté de manière raisonnable et sans addiction, n’a finalement pas grand chose à voir avec la cigarette et tous ses dérivés récents (vapoteuse, etc.) et ne devrait donc pas être soumis aux mêmes restrictions (taxes, avertissements sanitaires, traçabilité, et autres tracasseries).
Des marchés européens toujours secondaires
Mais pour légitime et enthousiasmante qu’elle soit – elle retire une épée de Damoclès suspendue au-dessus de toute une filière depuis sept ans -, d’un point de vue européen et français, cette decision n’est pas forcément la meilleure nouvelle qui soit. Elle confirme en effet l’attrait d’un marché américain déjà ultra-dominant pour les producteurs du Nicaragua, de République dominicaine et du Honduras.
Autrement dit, tant que ce marché restera celui où les producteurs de cigares (à l’exception notable de Cuba) écoulent les plus gros volumes – plus de 460 millions d’unités l’an dernier -, réalisent les plus grosses marges grâce à une taxation raisonnable voire nulle (comme c’est le cas en Floride), et peuvent travailler sans excès de régulation (pas ou peu d’avertissements sanitaires, des fumoirs nombreux, vente par correspondance et publicité autorisées…), on peut craindre que les marchés européens continuent à être considérés comme secondaires : moins de cigares, moins de nouveautés, bref, moins d’investissements à tous les sens du terme.
Laurent Mimouni
laurentmimouni@adc14.com
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