EXCLU – Helms-Burton : une première plainte contre Habanos SA et Imperial
Le chapitre III de la loi Helms-Burton activé par Donald Trump permet à des citoyens américains de poursuivre des entités cubaines ou étrangères faisant affaire avec des biens nationalisés par l’Etat cubain après 1959. Les héritiers de la fabrique H. Upmann se sont saisis de cette opportunité pour réclamer des compensations.
« Nous sommes assez tranquilles et nous ne prévoyons aucune action en justice contre nous », assurait Luis Sánchez Harguindey, le coprésident de Habanos S.A. en février dernier lors du Festival del Habano.
Une tranquillité bien mise à mal depuis plusieurs semaines puisque les héritiers de Ramón Rodriguez Gutiérrez ont déposé, le 6 août dernier, une plainte contre Habanos S.A devant un tribunal de Floride. Habanos S.A. est une co-entreprise possédée à 50-50 par l’Etat cubain et Imperial Brands, également visée par cette plainte.
Selon la plainte, dont L’Amateur de Cigare a obtenu une copie, la famille Rodriguez revendique l’héritage de ce qui est appelé aujourd’hui, par les Cubains, la « Manufacture de cigare José Marti », plus communément appelée fabrique H. Upmann (que nous visitions en juin dernier, au plus fort de l’épidémie de Covid-19 à Cuba).
En 1961, lorsque la jeune Révolution cubaine entreprend la nationalisation de toute l’industrie du tabac de l’île, la fabrique de la famille Rodriguez est confisquée. Aujourd’hui, sept héritiers réclament donc une compensation, en vertu du chapitre III de la loi Helms-Burton, activé par Donald Trump.
« Trafic » avec une entreprise confisquée
Depuis cette activation en avril 2019, l’industrie du cigare cubain avait été épargnée. Mais tous les regards étaient tournés vers Imperial Brands, l’entreprise britannique propriétaire de 50% de Habanos S.A. depuis 2007.
Imperial et Habanos sont donc accusés devant la justice américaine de « trafiquer » avec une propriété confisquée, tout comme trois agences de communication : la britannique WPP et les américaines Young & Rubicam et BCW LLC.
Contacté par L’Amateur de Cigare, le géant britannique du tabac a confirmé avoir connaissance de la plainte et prévoit de « se défendre avec vigueur ». Imperial précise qu’il « n’anticipe aucun impact sur les ventes de cigares premium » et estime qu’il « serait inapproprié de faire plus de commentaire ». L’agence publicitaire WPP, elle, n’a pas souhaité s’exprimer.
Actuellement, 29 procès sont ouverts aux Etats-Unis contre des entreprises internationales et cubaines (dont de grands groupes comme Amazon, Carnival Corporation, Pernod-Ricard, Mastercard, Tripadvisor…), en vertu du chapitre III de la loi Helms-Burton, selon les informations du Conseil commercial et économique américano-cubain. Plusieurs plaintes ont déjà été classées sans suite, mais cette loi a surtout l’effet d’une menace brandie par Donald Trump envers ceux qui voudraient s’aventurer à faire des affaires à Cuba.
Domitille Piron, correspondante à La Havane
(Photo : Luc Monnet)
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