Metz : Une civette ouverte en 1929
Metz, une belle endormie, drôlement réveillée depuis l’installation d’une antenne de Beaubourg et l’arrivée du TGV… Côté cigares, Le Longchamp, une institution locale, tend les bras aux amateurs.
Par Jean-Pierre Saccani
En 1929, Jean Hufnagl ouvre un débit de tabac, La Maison de la Chance, juste à côté de la place Saint-Louis, un fleuron médiéval. Quelques décennies plus tard, sa fille épouse Rémy Tritschler. Le gendre reprend l’établissement en 1964, le rebaptise Le Longchamp et attend une douzaine d’années pour inaugurer sa première cave sur mesure, « avec un linéaire de 2,40 m », se souvient Gilles Bohr, son successeur et mari de Valérie, l’une de ses filles. L’activiste de la cause des buralistes, qui fut président national, puis européen, de la Confédération des débitants de tabac pendant de longues années, avait besoin d’un second et, l’histoire se répétant, il a logiquement appelé son gendre…
Le Châteaux Margaux de Davidoff coûtait 42 francs
Nous sommes en 1983, Gilles Bohr commence à s’intéresser au cigare. « Les amateurs adoraient alors les Montecristo N° 4 et les châteaux de Davidoff, naturellement, je me souviens que le Château Margaux coûtait 42 francs. On les écoulait par coffrets ! » se souvient-il. La clientèle, les notables épicuriens de la ville pour la plupart, payait à coups de « pascals » sans barguigner… Un âge d’or révolu ? « En quelque sorte, mais disons plutôt que la situation a évolué », rétorque Gilles Bohr avec son air juvénile alors que la soixantaine arrive. Les changements notables arrivent lorsque sa civette bénéficie enfin du catalogue complet des havanes puis quand émergent de nouveaux terroirs avec les Pléiades, les Flor de Selva…
La concurrence du Luxembourg
Les caves du Longchamp abritent aujourd’hui 150 références. « Quand l’approvisionnement suit… », nuance toutefois Gilles Bohr qui regrette le manque persistant de quelques belles vitoles cubaines (Gigantes de Ramon Allones, Wide Churchills de Romeo y Julieta…) qui restent très demandées dans la région. D’autant que les buralistes locaux doivent supporter la concurrence du Luxembourg, distant d’une cinquantaine de kilomètres à peine. Les cigares y sont-ils moins chers, à l’instar des cigarettes ? « Non, à quelques exceptions près comme le D4, mais les Cohiba par exemple y ont des prix plus élevés. La grosse différence reste l’achalandage, très généreux, et les remises de 10 % consenties presque automatiquement par les civettes. Une pratique interdite en France », déplore Gilles Bohr qui a parfois l’impression de mener un combat à armes inégales.
Heureusement, aucun exode massif de la clientèle lorraine n’est à déplorer. « Au Luxembourg, le cigare est bling-bling et nos clients, souvent devenus des amis, ne font pas confiance à des vendeurs parfois peu connaisseurs. » Le conseil et la culture restent ainsi des valeurs sûres. Gilles Bohr inculque désormais ce qu’il a appris à deux de ses quatre fils qui l’épaulent au quotidien. Pour la première fois depuis trois générations, Le Longchamp ne se transmettra pas par les filles…
Le Longchamp, 35, pl. du Quarteau, 57000 Metz. Tél. : 03 87 75 70 21
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